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Université de Fribourg: démission du métropolite Hilarion

Reflétant le discours du doyen de la Faculté de théologie de l’Université de Fribourg, le dernier paragraphe de mon dernier blog (lundi 14 mars) transmettait une information fausse. Comme quoi, je peux, moi aussi, propager involontairement des Fake News! Parlant des effets collatéraux culturels et cultuels de l’invasion de l’Ukraine, ce paragraphe évoquait la «suspension» du métropolite Hilarion. En effet, le professeur de théologie incriminé n’a pas été écarté; il a spontanément donné sa démission, comme en témoigne sa lettre envoyée au doyen (qui n’a pas respecté la confidentialité de la lettre, ce à quoi il s’était engagé, paraît-il, engagé.)

Voici donc la lettre du professeur, le Métropolite Hilarion, datée du 3 mars 2022, telle qu’elle a été transmise par son secrétariat: «C’est le cœur brisé que je suis les récents développements en Ukraine et dans ses environs. Depuis 2009, date à laquelle j’ai été nommé président du Département des relations extérieures de l’Église du Patriarcat de Moscou, et surtout depuis 2014, date du début du conflit dans l’est de l’Ukraine, j’ai investi beaucoup d’efforts et d’énergie pour parvenir à la réconciliation et à la paix entre les peuples russe et ukrainien, et j’ai également aidé de nombreux chrétiens d’Ukraine à survivre. Si l’on veut obtenir de vrais résultats, cela ne se fait généralement pas par des déclarations publiques, mais par un travail quotidien difficile et épuisant, qui se déroule en grande partie à huis clos. Ce travail s’est considérablement intensifié ces derniers jours et se poursuivra jusqu’à la fin du conflit. L’Église à laquelle j’appartiens fait tout son possible pour aider les personnes qui souffrent, pour leur sauver la vie et pour mettre fin au conflit. Et je considère que c’est une bénédiction de Dieu de participer à ce travail. Cependant, ce n’est pas ce que la Faculté attend de moi. Dans ces circonstances, je pense qu’il est approprié de démissionner de mon poste de professeur titulaire et de vous remercier personnellement ainsi que la faculté pour de nombreuses années de collaboration fructueuse.»

Certes, le doyen de la Faculté aurait préféré une condamnation publique et solennelle de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Or, il n’avait à sa disposition qu’une lettre confidentielle qu’il s’est permis d’ailleurs d’évoquer en la trouvant insuffisamment pugnace. Et en oubliant (volontairement ?) la dernière phrase de la lettre rendue publique par le secrétariat du Métropolite Hilarion, dernière phrase actant la démission volontaire du professeur. Le doyen, connaissant les liens incestueux depuis longtemps entre l’Église officielle et l’État russe, imaginait-il que le représentant officiel du Patriarcat de Moscou allait publiquement se désolidariser du Patriarche Cyrille, son mandant? Ç’eut été, certes, une belle victoire morale à mettre au crédit de la théologie. Mais, si pari il y eut, il fut perdu.

Auteur:

Étienne Perrot sj est un jésuite de la Province d'Europe Occidentale Francophone (EOF) qui a vécu 15 ans à Genève (de 2001 à 2016), au sein de la communauté de Carouge. Il écrit régulièrement sur le site des jésuites de Suisse depuis 2013. Il est en outre membre du conseil de rédaction de la revue culturelle suisse choisir.
Étienne Perrot, né en 1944 dans le Doubs (France). Il a enseigné  l'économie et l'éthique sociale à Paris, et l'éthique des affaires à l'Université de Fribourg 3. Il a écrit plusieurs livres, notamment Esprit du capitalisme, es-tu là ? Derrière les chiffres, discerner l’humain, Bruxelles, Lessius 2020.

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