« Un regard sur Dieu »

En se définissant comme le bon berger, Jésus insiste sur le fait qu’il n’est pas un salarié. Son rapport aux brebis n’est pas un job parmi d’autres. Il est d’un autre ordre, une manière d’être qui révèle le fond de son être, l’expression de sa propre nature. Pour le faire comprendre, Jésus reprend à son compte le nom divin révélé à Moïse au buisson ardent : « Je suis… qui je suis » (Ex 3,13-14). « Je suis le bon Pasteur ». En d’autres termes : le souci des brebis extériorise mon rapport au Père. C’est un trait de ma divinité.

Jésus proclame la charte fondatrice du ministère pastoral : une vie donnée plutôt que l’appât du gain ou l’ambition d’une carrière. Le vrai berger donne sa vie pour son troupeau. En contraste, il épingle le cas du mercenaire pour qui les brebis ne sont qu’un gagne-pain parmi d’autres. Salarié, il ne s’identifie pas avec les brebis qui lui sont confiées mais avec son salaire. Parce que les brebis ne lui appartiennent pas, dès que la situation devient périlleuse, que rode le loup, il les abandonne à leur sort et prend la fuite à la recherche d’un autre job.

Puisque que le rapport de Jésus aux brebis est un trait de sa divinité, l’horizon s’élargit à la mesure de Dieu. Toute vision réductrice ou partisane est exclue. Le troupeau qui lui est confié ne se réduit pas à une coterie de partisans, une chapelle de bien-pensants. Le regard du pasteur balaie plus largement. Par-delà le petit troupeau homologué et des enclos reconnus, le nombre des brebis susceptibles d’entendre sa voix est aussi vaste que l’humanité. Comme il n’y a qu’un seul berger, il n’y a qu’un seul troupeau bien plus vaste que celui des statistiques officielles.

Dans la mesure où elle apporte une lumière sur Dieu l’allégorie du Bon Pasteur est émouvante et rassurante. La figure du Dieu vérificateur des comptes laisse la place au Bon Berger qui marche avec son troupeau dont il a pris l’odeur. Les brebis lui sont si étroitement liées qu’il est prêt à tout risquer pour elles, jusqu’à mettre sa vie en jeu. Avec lui elles se sentent en sécurité. Elles lui font confiance, sachant bien qu’il les emmène sur de bons pâturages. « Si je traverse les ravins de la mort, je ne crains aucun mal, car tu es avec moi : ton bâton me guide et me rassure. » (Psaume 22).

«Un regard sur Dieu» (Jn 10,11-18) – méditation de Pierre Emonet sj  du dimanche 21 avril 2024

Auteur:

Pierre Emonet SJ

Né en 1936, entré chez les jésuites en 1976, il se consacre à l'écriture et aux ministères ordinaires de la Compagnie: exercices spirituels dans la vie ou en retraites, accompagnement spirituel, prédication et aide dans le ministère paroissial. Il a également été le dernier directeur de la revue choisir qui a cessé de paraître fin 2022. Il a publié plusieurs livres, et notamment trois biographies de jésuites aux éditions Lessius : Ignace de Loyola - Légende et réalitéPierre Favre (1506-1546) - Né pour ne jamais s'arrêter, et récemment Pierre Canisius - L’infatigable réformateur de l’Église d’Allemagne (1521-1597). Il a également publié eb 2023, la première biographie en français de Pedro Arrupe sj: «Pedro Arrupe, un réformateur dans la tourmente». Un livre qui lui tenait à cœur –«mon dernier» précise-t-il– tant le Supérieur général de la Compagnie de Jésus du milieu du siècle dernier est pour lui «un modèle de jésuite».

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