«Que Dieu vous bénisse, Madame!» Ces simples paroles n’ont l’air de rien. Mais quelle force inouïe elles peuvent dégage quand elles sont adressées par un gardien à une détenue dans une cellule de la prison de Champ-Dollon. Quelle surprise inespérée dans ce milieu aride, humiliant et souvent déshumanisant du monde carcéral, où le moindre geste d’humanité revêt une portée aussi particulière qu’importante. Il en faut peu –une parole, un sourire, un bonjour– pour contribuer à humaniser ce monde dans lequel l’appartenance à une religion, une confession ou un milieu social devient si vite secondaires par rapport à l’expérience de la solitude, de la détresse et de la peur.
C’est cette expérience d’aumônier de prison qui m’interpelle quand je vois la situation de notre Église en ce début de nouvelle année scolaire. L’avenir de nos églises et services locaux est de plus en plus incertain, le synode sur la synodalité et les réformes qui vont ou pas suivre font déjà couler beaucoup d’encre, et dans la question des abus nous sommes encore loin de toute la vérité et de la justice due aux victimes. Tous ces thèmes sont bien sûr importants et vont nécessiter notre attention, notre temps et notre énergie. Mais comment ne pas céder à la tentation de tout faire tourner autour de nous, de nos questions, de nos structures et de notre avenir?
Le pape François nous incite à ouvrir les portes de nos églises et à aller à la rencontre du monde, et particulièrement de celui des défavorisées et des plus pauvres. Pour cela, nous pouvons évidemment former des groupes de travail pour évaluer ce que cela signifie pour nous, vers qui aller et où investir nos peu de ressources de la manière la plus efficace. Mais avant de risquer de nous embrouiller une fois de plus dans nos propres projets, ne pourrions-nous pas commencer par mettre en œuvre, dans nos rencontres quotidiennes, les outils d’humanisation les plus simples comme le BBM –Bonjour Bravo Merci– ou, pourquoi pas, de temps en temps un «Que Dieu vous bénisse!».
Oui, ça a l’air de rien, mais c’est comme la petite graine de moutarde. Qui sait ce que cela peut engendrer? Un jour, peut-être, quelqu’un en parlera dans son homélie, ou en témoignera dans une Newsletter.
Beat Altenbach sj
Parabole de la graine de moutarde
«Le Royaume des cieux ressemble à cette graine de moutarde qu'un homme a prise et semée dans son champ. C'était la plus petite de toutes les graines; mais quand elle poussa, elle devint la plus grande de toutes les plantes du jardin: elle devient un arbre, de sorte que les oiseaux viennent faire leurs nids dans ses branches.»