• Depuis plusieurs décennies, les grottes préhistoriques de Lascaux ont été fermées au public à cause des effets de la respiration humaines sur les peintures rupestres.

Le tourisme de demain ne ressemblera pas à celui d'hier

Jeudi dernier, le World Tourism Forum de Lucerne s’est penché sur l’avenir du tourisme. L’intervenant principal, un «futurologue» autrichien (en France on l’appellerait un prospectiviste, spécialiste, non pas de la prévision qui est une science, mais de la prospective qui est un art) a dressé un sombre tableau du tourisme de masse. Signe des temps, l’intervention fut reçue par visioconférence, pandémie oblige, même lorsqu’elle semble maîtrisée dans nos pays.

Le choc de la pandémie, très négatif pour le tourisme mondial (perte globale du chiffre d’affaires: mille trois cents milliards de dollars), a cumulé les restrictions quant aux transports de passagers internationaux et les fermetures de frontières. Ce qui a fortement impacté les pays comme la France (davantage encore que la Suisse) dont le PIB se nourrit majoritairement des services touristiques. (Fruit de trente année d’incurie politique, la désindustrialisation de la France fait ici sentir ses effets.)

Il ne s’agit pas simplement de prolonger les tendances passées, ce que font très bien les prévisionnistes sur la base des statistiques chiffrées et des calculs de variances. Il s’agit de tenir compte des changements structurels. C’est ainsi que les prospectivistes imaginent des scénarios en tenant compte des transformations futures, idéologiques, institutionnels, techniques et réglementaires. Pour aujourd’hui, en ce qui concerne le tourisme, la bonne attitude des futurologues cherche à ne pas se laisser aveugler par l’événement catastrophique de l’année 2020.

Comme les astronomes qui scrutent le fond de l’espace en éliminant, par des procédés techniques ingénieux, les étoiles et galaxies les plus récentes, les futurologues des services touristiques ne parient pas sur le prolongement stable des tendances d’avant Covid. Ils mettent au jour des faits nouveaux qui infléchiront sans doute beaucoup le secteur touristique de demain. En particulier l’effet pervers inattendu du tourisme de masse. Depuis déjà plusieurs décennies, les grottes préhistoriques de Lascaux, en Dordogne, ont été fermé au public à cause des effets de la respiration humaines sur les peintures rupestres. Il a fallu reconstituer à quelques encablures des grottes identiques, moins sensibles aux effets de masse. Venise est également un exemple bien connu des effets négatifs du tourisme de masse. D’autres lieux, célèbres ou moins connus (je pense au Mont Blanc ou au Puy de Dôme en Auvergne) ont pâti du tourisme. Sans parler des foules qui réjouissent commerçants, restaurateurs et hôteliers, mais qui indisposent les autochtones qui font pression sur les autorités pour restreindre l’afflux de touristes (je pense à la butte Montmartre au Nord de Paris).

Morale de l’histoire: de même que certains outils financiers, maniés avec discrétion, engendrent des performances étonnantes, mais qui diminuent lorsque ces outils sont adoptés par un grand nombre d’intervenants, de même certains sites touristiques conservent leurs attraits lorsqu’ils savent tenir à distance une foule dont le mimétisme est la seule motivation.

Tout le monde aura compris que je milite ici non pour un tourisme d’élite, mais pour un tourisme choisi, spécialité heureuse du secteur touristique helvétique.

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