Contre toute impatience, l’Évangile rappelle que le Seigneur n’entre pas dans l’histoire de l’humanité à la manière d’une météorite qui tomberait subitement du ciel. Bien qu’il existe des expériences mystiques, des retournements brusques et imprévus, dont il est difficile de comprendre la genèse, les promesses divines ne se réalisent pas par enchantement. Le Seigneur vient à la rencontre de l’homme à travers une histoire. Sa présence s’inscrit progressivement dans la réalité quotidienne, au rythme de l’évolution et du lent murissement de la vie. Elle suppose attention, patience et discernement.
Au temps de Jean Baptiste, la Parole de Dieu résonne au terme d’une longue attente, dans un contexte pas très porteur. L’époque est compliquée. La région se trouve sous occupation romaine, la politique, l’économie et la religion déstabilisées tentent de se réfugier dans un repli identitaire de type nationaliste. L’évangéliste mentionne les acteurs de la vie publique, les mêmes que l’on retrouvera au moment de la Passion.
Avec un pied dans l’Ancien Testament et l’autre sur le seuil du Nouveau, Jean Baptiste est le dernier maillon d’une longue chaîne d’attente. Vers lui convergent les regards. Sur les bords du Jourdain, aux confins du désert, à l’endroit où le peuple est enfin entré dans la Terre promise, il invite ses auditeurs à changer de cap. Qu’ils se tournent franchement vers l’à-venir et dégagent tout ce qui peut entraver le chemin du Seigneur. Leur attente individuelle et collective est en jeu.
On ne devient pas disciple du Christ du soir au matin. La rencontre avec le Seigneur est le fruit d’une histoire. Il faut de la patience et du discernement pour déchiffrer les indices d’une relation qui évolue au rythme de la vie pour investir progressivement une personne. En faisant l’anamnèse de sa propre foi on découvre que si le Dieu des surprises emprunte souvent des itinéraires inattendus sa présence est au bout du chemin.
Méditation à partir de l'Évangile pour le deuxième dimanche de l'Avent - 5 décembre 2021
«Murissement» (Lc 3,1-6) par Pierre Emonet sj