N'ajoutons pas trop vite ... et de la Résurrection!

Dimanche des Rameaux, 28 mars 2021 - Nous voilà donc entrés dans la semaine de la Passion. Ne rajoutons pas trop vite: et de la Résurrection. Ce sera pour le jour de Pâques, mais avant, il y a dans le texte de Marc cette entrée à Jérusalem et l’acclamation de joie sur le passage du «fils de David».

Vous trouverez le texte prévu en début de liturgie en ce dimanche des Rameaux au bas de cette chronique, car je ne suis pas certain que vous l’entendiez, puisque toute procession a été interdite. Même à Jérusalem:  je viens de recevoir un message de là-bas, me disant que la procession n’aura pas lieu à travers les rues de la ville, en descendant depuis le mont des Oliviers pour traverser le vallon du Cédron et remonter jusqu’à la Porte des Lions et l’église Ste-Anne. Comme chaque année, elle réunissait des milliers de fidèles, des communautés religieuses du pays, des pèlerins de passage, et … des curieux. J’ai aimé y participer chaque fois que je le pouvais - sauf les années où le gouvernement d’occupation interdisait la manifestation. Cette année, il semble que ce soit le covid-19 qui a gagné !

Mais revenons  la liturgie du jour. Sans trop comprendre ce qui leur arrivait, les foules acclament cet homme, qui représente un espoir, un à-venir peut-être. Les prophètes l’avaient annoncé: même dans les pires moments de leur histoire, tout ne sera jamais complètement détruit – Isaïe insistait: il y aura toujours un reste; et Zacharie, le dernier d’entre eux, le proclamait. il viendra, votre roi, comme un nouveau David, au nom du Seigneur, pour vous apporter cette Paix tant désirée.

Mais qui est cet Homme?

On avait oublié la précision de la prophétie de Zacharie: «il viendra, juché sur un ânon, le petit d’une ânesse». Vous avez déjà vu un paysan caracoler sur un âne, en relevant ses jambes pour qu’elles ne trainent pas parterre; il n’a vraiment rien de majestueux. Il n’est pas à cheval, comme les vainqueurs le jour de leur triomphe. Et ce ne sont pas ses troupes qui l’applaudissent, mais les foules de petites gens, trop heureuses de faire la fête en brandissant des palmes. Je dirai aujourd’hui qu’ils ont tous sorti le maillot du club et ils font tournoyer en l’air l’écharpe aux couleurs du parti ou de leur équipe. Enfin, …tant que leur club gagne! Car ils sont là précisément pour fêter la victoire de leur club, devant les badauds étonnés qui cherchent à savoir: «C’est qui?»

Avons-nous une réponse à leur donner? – Oui, il s’agit d’un certain Jésus, de Nazareth, en Galilée. Vous connaissez?

Pour les initiés, la liturgie peut se poursuivre, et il nous faudra entendre toute la lecture de la Passion (chez Marc, chapitres 14 et 15), pour comprendre:

«Oui vraiment, cet homme était le fils de Dieu!»

Or le comble, c’est que cette phrase n’est pas prononcée par les docteurs de la loi, les spécialistes en théologie, ceux qui connaissent les écritures pour les étudier à longueur de semaine dans leurs lieux de culte: eux le traitent de blasphémateur, ils lui préféreront Barabbas, un bandit. Elle n’est pas prononcée non plus par ses disciples, les membres du club: ceux-là l’ont tous abandonné, ils ont fui par peur, ils l’ont renié, même celui qu’Il avait pourtant surnommé «le costaud», le «ro », ils l’ont trahi, même celui auquel on avait confié l’argent de la bande. Non, cette parole est proclamée par un païen, un officier de l’armée d’occupation, qui est là pour faire son boulot. Et son boulot, c’est de mettre à mort et de vérifier que mort s’en suive!

Oui, l’évangéliste Marc ne cherche pas à voiler la réalité affreuse de cette condamnation injuste, sans preuve. J’en finis par croire que c’est lui le gamin qui suivait la scène de loin, juste emballé dans un drap, et qui s’enfuit tout nu lorsqu’on veut l’attraper. Dans tous les cas, c’est celui des quatre évangélistes qui est le plus clair: la bande à Jésus est dissoute, il n’en reste pas un… après la défaite. Les maillots et les écharpes du club ont disparus.

Ont-ils donc déjà oublié ces moments sublimes où Il disait des choses merveilleuses, où Il posait des actes inimaginables, ces heures hors du temps où Il tentait de nous faire comprendre que rien n’est jamais perdu ? Certes, il précisait que ce n’est pas le plus fort qui gagne ! est-ce pour cela qu’Il acceptait qu’on le nomme « fils de David », de ce petit qui avait terrassé le géant avec une fronde et quelques cailloux!

Ne ressentent-ils plus cette émotion qui les avait saisis lorsqu’Il avait osé hurler à la face du monde: «heureux les pauvres, ceux qui pleurent, ceux qui ont faim et soif de justice»!

On y avait cru. Y croit-on encore, en cette heure où tout semble fini…?

Or c’est lui, le centurion, qui nous le rappelle, comme si tout l’évangile n’avait été écrit et proclamé que pour aboutir à cette reconnaissance : oui, vraiment, cet Homme était le fils de Dieu!

D’où tire-t-il cette conviction, lui l’homme de guerre, qui a probablement tué et certainement fait tuer, voler, violer, écraser, brûler. sans jamais pouvoir y trouver satisfaction, sinon celle d’un travail accompli. Mais quel travail ! De quelles paroles, de quelles actions de Jésus, a-t-il été le témoin ? la seule mention que retient Marc pour répondre à ces questions, c’est de préciser que « le centurion était en face de Jésus voyant comment il avait expiré»!

Et le voilà qui a tout compris: «Dieu abaisse les puissants de leurs trônes, il élève les humbles». Seuls celles et ceux qui ont vécu le « Magnificat» peuvent voir dans ce mystère du Calvaire la réalisation du projet de Dieu sur l’humanité: «il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’il aime» (Jn 15, 13).

Que durant cette semaine dite sainte il nous soit donné de voir, que même dans le plus parfait dénuement la Vie transcende toutes nos morts!

Relisons domnc ce texte, car c’est bien là qu’il nous faut situer le départ de cette (dé)marche qu’on appelle «semaine sainte».

Marc 11, 1-10

Quelques jours avant la fête de la Pâque, Jésus et ses disciples, approchant de Jérusalem, arrivèrent à Bethphagé, sur les pentes du mont des Oliviers. Alors Jésus envoya deux disciples: “Allez au village qui est en face de vous, vous trouverez aussitôt une ânesse attachée et son petit avec elle. Détachez-la et amenez-les-moi. Et si l’on vous dit quelque chose, vous répondrez: “Le Seigneur en a besoin.” Et aussitôt on les laissera partir.

Cela est arrivé pour que soit accomplie la parole prononcée par le prophète: “Dites à la fille de Sion : Vois ton roi qui vient vers toi, plein de douceur, monté sur une ânesse et un petit âne, le petit d’une bête de somme”. Les disciples partirent et firent ce que Jésus leur avait ordonné. Ils amenèrent l’ânesse et son petit, disposèrent sur eux leurs manteaux, et Jésus s’assit dessus.

Dans la foule, la plupart étendirent leurs manteaux sur le chemin; d’autres coupaient des branches aux arbres et en jonchaient la route. Les foules qui marchaient devant Jésus et celles qui suivaient criaient: “Hosanna au fils de David! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur! Hosanna au plus haut des cieux!”

Comme Jésus entrait à Jérusalem, toute la ville fut en proie à l’agitation et disait: “Qui est cet homme?” Et les foules répondaient: “C’est le prophète Jésus, de Nazareth en Galilée.”

À son propos:

Né en 1940, entré chez les jésuites en 1966, il est archéologue et spécialiste de la Bible. Le Père Livio conduit régulièrement des groupes dans les pays du Proche-Orient et donne divers enseignements à partir de la Bible, en Suisse et à l'étranger, notamment au domaine de Notre-Dame de la Route à Villars-sur-Glâne (Fribourg). Il a été durant de nombreuses années membre du comité de rédaction de la revue choisir.

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