Le lundi 12 septembre 22, le site d’inspiration catholique, aleteia.org, évoque ce qu’une journaliste intelligente a qualifiée de «petite idée incongrue»: la béatification –voire canonisation– de John Ronald Reuel Tolkien, auteur anglais, catholique affirmé, dont les deux principaux romans sont universellement connus, Bilbo Le Hobbit et la trilogie du Seigneur des anneaux. L’occasion de cette «petite idée incongrue» est le succès de la Série télévisée "Les Anneaux du Pouvoir", Série inspirée de la saga de cet Anglais. «Chrétien pratiquant convaincu, affirme le site catholique, il se pourrait qu’un jour sa cause en sainteté soit ouverte.
Pour le dire d’emblée, je ne l’espère pas. Certes, la sainteté étant cette proximité du croyant avec son Dieu, je n’ai pas les moyens de juger de la sainteté de J.R.R. Tolkien. Les convictions religieuses qui transparaissent dans ses romans, convictions précisément répertoriées par les analyses littéraires, me semblent tout à fait insuffisantes pour juger de la sainteté de l’auteur. L’affrontement du Bien et du Mal, l’amitié entre Legolas et Gimli, la singularité des personnages, l’humour –cette première qualité spirituelle–, la multiplication des scènes émouvantes, le respect des créatures les plus étrangères à l’habitus du Milieu, tout cela concorde assez biens avec les valeurs chrétiennes. Je n’en disconviens pas.
Sur le côté de la vie personnelle, familiale et patriotique de Tolkien, là encore, la pâte (ou la patte) chrétienne semble également présente. Cette fidélité à la promesse faite à sa fiancée, conservée après trois années de séparation involontaire, ce témoignage de père attentif et de mari tendre et aimant, et jusqu’à ce petit groupe d’ami qu’il avait réuni (club surnommé The inklings –littéralement les petites idées– baignant dans un esprit œcuménique) lorsqu’il était professeur à Oxford, tous ces éléments biographiques épars pourraient certes être versés au dossier de canonisation de Tolkien. De même la conversion à l’Église catholique de sa mère Mabel, sous les auspices de Francis Morgan, prêtre de l’Oratoire, qui fut pour le jeune John Ronald Reuel un tuteur exemplaire.
On pourrait accumuler toutes les raisons de canoniser J.R.R. Tolkien, je maintiendrais quand même qu’il ne faut pas rajouter sur les autels un saint supplémentaire, surtout s’il s’agit –comme pour le pape Jean-Paul II– d’un personnage bien connu des médias. La sainteté appelle la discrétion, aujourd’hui plus que jamais.
