Il y a peu, j’ai participé à une réunion au collège allemand de St Blasien dans le Bad Wurtenberg. Un collège jésuite installé dans une ancienne abbaye bénédictine. Un lieu un peu à la Harry Potter. Immenses bâtiments, fabuleuse architecture… Et en plus, c’était la première incursion de l’hiver, la neige est tombée pendant plusieurs heures et il faisait froid. Paysage idyllique, neige en abondance… l’hiver de carte postale comme on le rêve. Évidemment la magie n’a pas duré, deux jours après mon arrivée la température a baissé... Plus d’hiver!
Cette expérience qui réveillait des souvenirs d’enfance et peut-être aussi une sorte d’idéal dont je ne suis pas sûr qu’il ait jamais existé, m’a incité à me pencher sur mes attentes à l’égard de Noël.
Lorsque nous regardons les affiches, les publicités dont nous sommes bombardés en cette période, il n’est question que de neige et de gens heureux. Avant même la consommation, c’est cette image idéalisée qui attire mon attention. Nous espérons des Noëls blancs qui n’arrivent, il faut bien le reconnaître dans nos villes, pas très souvent. Nous rêvons aussi d’une fête de l’harmonie et de la rencontre…
Il y a dans cette aspiration quelque chose de construit qui n’a que peu à voir avec la réalité. D’un point de vue religieux, la réalité de Noël est presque un peu déroutante.
Jésus n’est certainement pas né un 25 décembre, cette date a été choisie en fonction du solstice d’hiver (célébré le 25 dans le calendrier julien), le moment où les jours se rallongent. Il s’agissait à la fois de signifier la victoire du Christ sur les ténèbres et la mort, et de remplacer la fête païenne du soleil invaincu.
Les rois mages ne sont pas rois, mais comme on le voit dans les représentations artistiques, des hommes venant de différents continents et d’âges différents, une façon de rappeler l’importance pour le monde entier de cette naissance (Isaïe 60,3-6 ; Ps 72(71),9-11). À partir de ces textes, s’est construit la légende des rois mages. Les évangiles apocryphes y contribuant aussi largement.
L’âne et le bœuf eux aussi ne se trouvent que dans les évangiles apocryphes (Évangile du Pseudo-Matthieu) en écho à un verset du prophète Isaïe (1,3).
Les bergers n’étaient pas, dans la culture du moyen orient ancien, de braves pâtres mais des gens considérés comme des marginaux dont il faut se méfier. Et pourtant, ce sont eux les premiers messagers de cette bonne nouvelle.
Le récit que les évangiles de Matthieu et Luc font de la naissance de Jésus a pour fonction de mettre en évidence le choix de Dieu d’être auprès des plus petits et de tous les habitants de la terre. Il s’agit de mettre en évidence la dimension théologique de cet événement:
Dieu vient au-devant de l’humanité en se présentant faible et vulnérable.
À Noël, nous fêtons cette volonté de Dieu de rejoindre l’humanité dans sa fragilité et ses dépendances. Il ne s’agit pas de fêter un monde idéal mais de reconnaître la présence de Dieu dans ce monde fragile et tiraillé qu’est le nôtre.
Bruno Fuglistaller sj