• Pierre Canisius le catéchiste.
  • Main reliquaire de saint Canisius qui se trouve depuis le 27 avril 2021 à la cathédrale de Fribourg
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Pierre Canisius 1521-1597: «Fort comme un chêne»

Il y a tout juste un an, le 27 avril 2021, la nouvelle Province jésuite d’Europe centrale était créée ! Un 27 avril, jour où nous, jésuites, fêtons l’un des nôtres: Pierre Canisius sj! Saint patron de notre Province, compagnon de la première heure ayant été initié aux Exercices spirituels par saint Pierre Favre sj, Pierre Canisius fêtait en 2021 les 500 ans de sa naissance. Mort à Fribourg, saint Canisius n’a pas pris une ride de désuétude! «Son époque et la nôtre se ressemblent plus qu’il n’y paraît», relève l’historien Jean-Blaise Fellay sj qui dresse le portrait du saint et de son époque ci-dessous.

La grande modestie de Canisius lui aura fait du tort. Ce travailleur acharné a toujours gardé la mesure dans ses expressions. Il se montrait si vertueux qu’il passait pour un saint déjà de son vivant. Sa très réelle humilité déroba aux regards sa grandeur. C’est tardivement qu’il reçut le titre de Docteur de l’Église et de «Deuxième apôtre de l’Allemagne» (le premier étant saint Boniface au VIIIe siècle). Avec le recul, la puissance de son œuvre est apparue.

Il était né dans une époque semblable à la nôtre. Si la crise de l’Église est évidente aujourd’hui, elle l’était tout autant au milieu du XVIe siècle. Le nombre des prêtres avait chuté, celui des moines également. L’Europe était traversée de guerres incessantes et menacée par la puissance ottomane qui avait soumis le Proche-Orient et achevait de conquérir les Balkans. Le dynamisme de la Renaissance bousculait les structures mentales du Moyen Âge, l’exploration des Amériques et de l’Extrême-Orient élargissait les anciennes références géographiques et le développement de l’imprimerie multipliait l’impact de ces nouveautés.

C’est dans ce monde en changement que naît Pierre Kanis, qui a latinisé son nom en Canisius, à la manière des humanistes. Il apparaît donc comme un caractère particulièrement stable. Stable mais pas réactionnaire. Il avait de solides racines. Son père, magistrat, était l’homme de confiance du duc René II de Lorraine, puis neuf fois bourgmestre de Nimègue. Il avait été éduqué dans la spiritualité de la Dévotion moderne, dont sa tante, moniale, était une représentante.

Étudiant à Cologne, il entre en contact avec le milieu des chartreux de la ville, dont van Esche et Jean de Landsberg. Quand il rencontre en 1541 Pierre Favre, le premier jésuite envoyé en Allemagne, il suit les Exercices spirituels d’Ignace de Loyola. Il enrichit son expérience spirituelle de la fougue hispanique, dopée par le succès de la Reconquista sur l’Islam et la mission en Amérique et en Asie.

Formé personnellement par saint Ignace à Rome, il participe à la fondation du collège de Messine en Sicile et commence son étonnante carrière de réformateur de l’Église de langue allemande. Professeur, prédicateur, administrateur, conseiller des princes et des évêques, écrivain, il transforme la catéchèse, implante des collèges dans les lieux stratégiques d’Allemagne, d’Autriche et de Suisse. Ce mouvement de portée mondiale touche l’Europe, l’Amérique, l’Asie et l’Afrique. C’est ainsi que le catéchisme de Canisius était traduit en 1597 en 22 langues dont le japonais et l’hindi. C’est un mouvement religieux qui implique l’enseignement, la musique, le théâtre, la peinture, l’architecture et les sciences. Il est à la base du rayonnement de la culture baroque. C’est aussi ce qui donne à cette civilisation sa dimension pédagogique. Canisius en est un bon exemple, même s’il reste lui-même dans sa vie personnelle d’une austérité marquée.

Je suis personnellement frappé de voir combien la ville de Fribourg reste marquée par son esprit, au travers du Collège Saint-Michel. «Persévère» notait dans son journal le jeune Pierre Kanis. Ce principe explique à la fois son enracinement dans le meilleur du passé et sa capacité à utiliser tout ce que la modernité apportait comme avantages pour servir «au bien des hommes» comme il l’espérait.

Auteur:

Né en 1941, entré chez les jésuites en 1961, spécialiste de l’Histoire de l’Église, était engagé comme directeur spirituel au Séminaire diocésain du Diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg et au Séminaire diocésain de Sion. Le Père Fellay a été rédacteur en chef de la revue culturelle choisir, directeur du centre interdiocésain à Fribourg, professeur à l'Institut Philanthropos et responsable du programme de formation du domaine de Notre-Dame de la Route à Villars-sur-Glâne.

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