Parce que Jésus a affirmé qu’il était le Messie, le Fils de Dieu, le Sanhédrin l’a condamné à mort pour sacrilège. En portant le cas devant le préfet romain, les grands prêtres ont modifié l’acte d’accusation. En prétendant qu’il se fait passer pour le «roi des Juifs», Jésus est coupable d’insurrection contre Rome, un délit passible de la crucifixion. Au cours de l’Histoire, la même perfidie refera régulièrement surface. Chaque fois que les ennemis de l’Église voudront la discréditer, ils l’accuseront de faire de la politique, de troubler l’ordre public, de s’opposer aux puissants et aux détenteurs du pouvoir.
Pilate qui n’a que faire des querelles religieuses des Juifs. Très sensible à tout ce qui menace l’ordre romain, il instruit le procès. Es-tu bien le roi des Juifs comme le disent tes accusateurs? Sans chercher à se justifier Jésus répond aux craintes du préfet. S’il voit en lui un agitateur, il s’est laissé abuser par ceux qui l’ont livré. Certes, il est bien roi, mais pas comme Pilate pourrait le craindre. Sa royauté ne s’incarne pas dans un système politique ou social, elle n’est pas de ce monde. Donc pas de danger d’insurrection en vue! La preuve? Jésus n’a ni partisans ni troupes qui puissent le défendre. Ainsi en va-t-il aussi de l’Église. Si des chrétiens peuvent s’engager en politique à titre personnel au nom de leur foi, l’Église en tant que telle ne peut s’identifier avec aucun parti politique.
Sans reprendre à son compte le titre de roi «des Juifs», Jésus n’en revendique pas moins une royauté d’un autre ordre. Quittant l’ambiguïté du terrain politique, il invite Pilate à le suivre sur un autre plan, plus transcendantal. Tu crains que je sois un roi politique, mais moi je te parle d’un autre royaume, je suis venu pour rendre témoignage à la vérité. La vérité, c’est la réalité, ce qui existe, le socle fiable sur lequel bâtir une vie. Pour Jésus, rendre témoignage à la vérité signifie dévoiler le réel, être maître de vie, pour que rien ne reste caché: Je suis le chemin, la vérité et la vie». Incapable de comprendre, Pilate en reste à ses premières impressions. Il fera fouetter Jésus avant de le condamner à mort.
«L’heure de vérité» (Jn 18,33-37), la méditation de Pierre Emonet sj pour le dimanche 24 novembre 2024