On parle de moins en moins du péché à l’Église: cela semble dépassé, étroit, moralisateur, focalisé sur le négatif; cela rappelle un Dieu punitif. Pourtant, dans le langage courant, le mot n’a pas disparu: on évoque des «péchés» en matière de circulation ou de climat, des péchés alimentaires ou encore des fautes de goût. Le mal existe donc : lorsque les erreurs des célébrités sont exposées au grand jour, les médias crient au scandale et fustigent sans pitié les personnes concernées. Au fond de nous, nous savons qu’il existe bel et bien des actes répréhensibles, qui nuisent volontairement à autrui et vont à l’encontre de l’ordre de la création — Dieu ne veut que le bien! C’est précisément cela, le péché.
Ce sujet refait en quelque sorte surface. Nous avons l’impression de voir se multiplier les péchés graves: la brutalité des guerres; des gouvernements autoritaires qui emprisonnent ou empoisonnent leurs opposants; des slogans antisémites ou misogynes; l’avidité de certains, toujours insatisfaits; la violence au sein des familles; la fraude financière; les agressions sexuelles; l’orgueil qui méprise; le pouvoir qui impose ses intérêts sans scrupules… Le péché est omniprésent. Et même ceux qui en sont relativement épargnés n’ont qu’à regarder autour d’eux ou suivre l’actualité. Honnêtement, je peux me demander: n’y ai-je pas aussi ma part de responsabilité, grande ou petite? Ne tire-je pas un certain profit de l’injustice de ce monde? Ne suis-je pas parfois un peu orgueilleux, ou égoïste?
En ce temps de Carême et de Passion, il est bon et salutaire de prendre conscience du péché — celui des autres, certes, mais surtout du mien. Je m’examine, et je vois là où je faillis. Cela peut être douloureux; je regrette peut-être certaines choses. Mais cela m’aide à me repentir. Bien souvent, ce sont de petits ajustements dans ma vie qui peuvent tout changer. La vie devient alors plus honnête, plus libre, plus paisible, plus sereine.
Au cours de sa Passion, Jésus a été submergé par une violence brutale et mis à mort. En portant le péché jusqu’au bout, il nous a libérés de toute culpabilité — un mystère que nous ne pouvons comprendre, mais seulement croire. Le péché a été vaincu par Dieu, une fois pour toutes. Dans cette vie, nous n’en faisons qu’une expérience partielle ; dans l’autre, elle sera totale. Par sa Résurrection, Jésus nous ouvre à cet avenir. Rendons grâce au Seigneur et louons-le, en ces jours de Carême et de Pâques.
Suggestion de lecture : Le Père Stefan Kiechle sj a publié dans la série Ignatianische Impulse le petit livre Sieben Todsünden (Les sept péchés capitaux). Uniquement en allemand.
Illustration: Péchés capitaux dominés par la mort par James Ensor, 1904 - collection du Museum Plantin-Moretus @ Creative Commons CC0 1.0 Universal Public Domain Dedication.