• Cours de Zumba @ Pexels/Kate Trysh

La danse est le meilleur des sports… spirituels

«La danse est toujours le meilleur des sports» prétendait un journal genevois au printemps dernier (Le Temps du 21 mars). Étaient particulièrement visées les danses collectives où, tel le suiveur dans une course cycliste, on est entraîné, presque malgré soi et sans y penser, à poursuivre son effort. La raison en est que la danse «fait travailler le cœur, le corps et la tête, rend joyeux et crée du lien, sans nous mettre en danger.» Les psychothérapeutes ajouteraient sans doute que la danse est un excellent antidépresseur.

L’auteur de l’article cité monte en épingle la Zumba (souvent utilisée en Fitness) «sport le plus stimulant que j’aie jamais pratiqué, car, loin d’être réservée à des décérébrées en rose fluo, cette danse cardio exige coordination des mouvements et maîtrise des enchaînements. La tête et les jambes, quoi. Et, en prime, la joie, puisqu’il est impossible de danser sans ressentir ce frétillement en soi.» Et de citer Lucy Vincent, auteur d’un ouvrage paru en 2019 Faites danser votre cerveau! selon qui «la danse cumule toutes les qualités. Elle fait travailler le cœur, les muscles, les articulations, la mémoire, la coordination et procure un tel plaisir, souvent collectif, que tout ce labeur se déroule dans la bonne humeur.»

En matière de danse, je suis un croyant non pratiquant. Et je regrette de ne pouvoir, pour des raisons d’âge et se statut, m’adonner à ce ‘meilleur des sports’. C’est pourquoi j’ajoute volontiers deux mots dans la musique en soulignant que la danse peut se vivre non seulement comme un exercice physique, mais également comme un exercice spirituel. Ne s’agit-il pas d’exprimer par le corps le génie – si génie il y a – de la musique ? Il n’y a rien de pire que ces chorégraphies qui transforment les danseurs en mimes, séparant ainsi d’un côté la musique, de l’autre les postures corporelles qui se dégradent alors en vulgaires gesticulation.

La dimension spirituelle de la danse peut également se cacher dans la créativité du corps se rapportant à son environnement immédiat. Dans les soirées où les danseurs amateurs sont confinés dans un espace réduit, l’environnement immédiat est fait de l’amalgame des multiples corps des autres danseurs qui trouvent parfois un certain plaisir à s’imiter mutuellement jusqu’à singer ces corps de ballet chorégraphiés par Marius Petipa. Ce n’est certes pas désagréable à regarder. Mais, tels des défilés militaires, je m’en lasse assez vite. Je préfère voir une danse où chacun se ‘pose’, s’ex–pose dirait Levinas, ‘se produit’ comme on dit aussi dans les milieux artistiques, bref risque sa singularité à la vue de tous dans une harmonie toujours à rechercher et à redécouvrir.

Nietzsche prétendait qu’il ne croirait qu’à un Dieu qui saurait danser. Je préfère croire à un Dieu qui nous invite à danser.

À son propos:

Étienne Perrot sj est un jésuite de la Province d'Europe Occidentale Francophone (EOF) qui a vécu 15 ans à Genève (de 2001 à 2016), au sein de la communauté de Carouge. Membre du conseil de rédaction de la revue choisir  jusqu'à sa fermeture fin 2022, il écrit régulièrement sur le site des jésuites de Suisse depuis 2013, et sur celui de la Province d'Europe centrale en français depuis sa création en 2021. Conseiller de la rédaction de la revue Études (Paris), le Père Perrot sj rédige deux blogs hebdomadaires: Deux doigts au-dessus du sol et Coup d’épingle. Cet été 2024, il quitte Lyon pour rejoindre Paris

Étienne Perrot, né en 1944 dans le Doubs (France). Il a enseigné  l'économie et l'éthique sociale à Paris, et l'éthique des affaires à l'Université de Fribourg 3. Il a écrit plusieurs livres, notamment Esprit du capitalisme, es-tu là? Derrière les chiffres, discerner l’humain, Bruxelles, Lessius 2020.

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