Deux récits de miracle imbriqués l’un dans l’autre. Il s’agit de deux femmes, une personne d’un certain âge, et une fillette de douze ans. La femme souffre depuis longtemps d’une maladie honteuse qui la rend impure et la tient à l’écart d’une vie sociale normale. Pas question pour elle d’approcher les autres, surtout pas de contacts physiques. Pour la petite fille il n’y a plus rien à faire, elle est décédée et les rites funèbres ont déjà débuté.
Aussi divers soient-ils, les deux épisodes ont un commun dénominateur:
Face à des situations désespérées et sans issues Jésus le guérisseur apparaît comme l’ultime recours, qui justifie parfois la transgression de l’ordre public et religieux.
Le père de la fillette, un chef de synagogue, n’a pas hésité à appeler Jésus au secours à son retour d’une région païenne. Quant à la femme, perdue dans la foule, elle profite d’une bousculade pour oser, en cachette, un geste formellement interdit en touchant le manteau de Jésus.
Dans leur désespoir, le père éploré et la malade ont fait preuve d’audace et de confiance. Jésus est plus touché par la détresse de ces personnes que par la violation des lois casher. Au père, qui vient d’apprendre qu’il n’y a plus d’espoir parce que sa fille est morte, Jésus recommande de ne pas craindre, de garder confiance malgré tout. Quant à la femme honteuse et culpabilisée, Jésus la rassure en lui disant qu’elle a bien fait, qu’elle peut s’en aller en paix. La voilà absoute et doublement sauvée, de sa maladie et de son exclusion sociale. Le respect de l’institution et l’obéissance à la Loi la maintenaient prisonnière de son mal, l’audace et la confiance l’ont libérée.
En saisissant la main de la fillette défunte, Jésus lui-même a violé un tabou, l’interdiction de toucher un cadavre sous peine d’impureté légale (Lev 11,27). Celui qui réveille la fillette du sommeil de la mort proclame que plus qu’un simple guérisseur, il est le maître de la vie. L’évangéliste Marc ne manque pas de le suggérer en utilisant le même mot grec pour dire le retour à la vie de la jeunes-fille et la résurrection du Christ.
Lorsque l’intégrité physique et sociale d’une personne est en jeu, et que les lois sociales et religieuses se révèlent inopérantes, la confiance et le recours au Christ ouvrent un chemin de liberté et de paix.
«La confiance mieux que les lois» (Mc 5,21-43) - méditation de Pierre Emonet sj pour ce dimanche 30 juin 2024