La Passion de Jésus Christ ! Il ne s’agit pas d’un reportage ni d’une chronique judiciaire mais de la dernière étape d’un amour inconditionnel. Dès les débuts, Jésus vivait en tension vers «son heure», là où il donnerait toute sa mesure. Il a fallu l’extrême de cette condamnation à mort pour que se découvre le sens ultime d’une vie donnée sans condition à ceux qui n’en ont pas voulu.
Sortir de soi, se quitter pour aimer les autres, même s’ils finissent par vous assassiner! Jésus ouvre un chemin; il va devant. Ceux et celles qui veulent le suivent doivent, comme lui, prendre la croix d’un amour sans retour. Le Christ ne leur demande pas de cultiver la souffrance, ni de s’autoflageller ou d’expier un problématique péché des origines. Pas de masochisme, mais une marche sans cesse recommencée pour se quitter soi-même, s’affranchir de son ego, pour aimer jusqu’à l’extrême, au prix même d’un refus qui entraine la mort.
Jésus avance résolument vers sa Passion. S’il affirme clairement ses choix au cours de procès truqués, il ne va pas au-devant de son destin avec des chants de victoire. La nuit obscure de Gethsémani est une agonie, un combat qui le met à terre. Seul, écrasé, privé de l’appui des amis qui dorment, trahi par un proche, sous un ciel imperméable, l’amour et le repli se disputent son cœur. Oscillant entre la mort et la fuite, son cœur, sa volonté, toute sa sensibilité se révoltent, mais c’est l’amour qui finit par l’emporter: «Que cette coupe passe loin de moi ! Cependant, non pas comme moi, je veux, mais comme toi, tu veux.»
Avant de partir vers Gethsémani, Jésus a offert à ses disciples le pain et le vin comme un viatique pour la route qui les attend. C’est le souvenir qu’ils garderont de cette dernière étape d’un chemin sans retour qui allait le conduire au don total de soi. Au long des âges, sa célébration fortifiera le cœur et ranimera les énergies. Que les disciples s’en souviennent et n’en fassent pas une simple gourmandise spirituelle.
«Jusqu’au bout de l’amour» (Mt 26,14-27,66) - Méditation à partir de l'Évangile de Pierre Emonet sj pour le dimanche des Rameaux, 2 avril 2023