Le dimanche 27 mars 2022 à 13 heures, Diaspora TV Switzerland a inauguré une émission mensuelle en langue ukrainienne. Le but en est d’«aider les nouveaux arrivants à comprendre leur pays d’accueil». Le moyen en est double: les informations et les débats. Les informations portent sur l’histoire helvétique ainsi que sur les us et coutumes, les traditions, l’organisation politique, les institutions, les questions pendantes qui agitent au quotidien les opinions et les courants d’idées. Les débats se déroulent entre des membres de la diaspora ukrainienne déjà installée en Suisse et les nouveaux arrivants chassés de leur pays par la guerre.
Je ne peux qu’applaudir à cette initiative fédérale. Les gens hargneux diront que c’est une goutte d’eau dans l’océan de ce qu’il faudrait faire pour accueillir décemment les émigrés d’un pays qui, culturellement, nous est plus proche que bien d’autres. Mais il serait stupide de cracher sur une décision qui, sans résoudre à soi-seule tous les problèmes, va dans le bon sens.
Cette initiative va dans le bon sens car elle promeut l’inculturation nécessaire pour renforcer le lien social en Suisse, le pays le plus central de l’Europe, qui a vu converger sur son sol, génération après génération, des peuples aux cultures diverses et aux idéologies divergentes. L’inculturation est un effort que le pays peut très légitimement exiger de celles et ceux qu’il accueille sur son sol. Si l’on ne veut pas que les ingrédients de la fondue se répandent sur la table en une bouillie infâme, il faut un caquelon suffisamment résistant.
Inculturation et acculturation
Mais l’inculturation où les arrivants s’imprègnent de la culture commune, aussi nécessaire soit-elle, est insuffisante, me semble-t-il, sans son complémentaire que je nommerais volontiers acculturation (pour reprendre la distinction entre inculturation et acculturation, distinction chère au Père Jean-Yves Calvez, jésuite, qui fut un grand spécialiste de la pensée de Karl Marx et de la dynamique sociale). L’acculturation est l’attitude qui consiste à chercher à comprendre celle et celui qui arrive, plutôt que de s’indigner ou de louer. Spinoza, dans son traité de philosophie politique, en avait fait le leitmotiv d’une démarche compréhensive. L’émission mensuelle en langue ukrainienne de Diaspora TV Switzerland relèvera très certainement ce défi. Et je parie qu’elle le gagnera.