L’Avent, tout tendu vers l’avenir dans l’attente d’une rencontre. Le moment est incertain, mais le rendez-vous assuré. Le Seigneur s’annonce. Il ne joue pas à cache-cache, ni ne cherche à nous surprendre en se présentant à l’improviste. Que ses disciples ne s’endorment pas! Qu’ils ne se laissent pas gagner par la lassitude ni ne restent prisonniers de la routine d’une vie au ras du sol. Certes, il faut bien gagner sa vie, soutenir une famille, exercer une profession, assumer tant d’engagements légitimes. Loin de condamner la contrainte quotidienne, le Christ lui-même l’a vécue. Mais l’immersion dans l’immédiat peut agir à la manière d’un anesthésiant et faire perdre de vue un horizon plus large. Les contemporains de Noé en savent quelque chose, qui avaient oublié l’imminence du rendez-vous. «On mangeait, on buvait, on prenait femme, on prenait mari …, les gens ne se sont doutés de rien, jusqu’à ce que survienne le déluge qui les a tous engloutis.»
«L’un sera pris, l’autre laissé». Quand bien même proches, unis dans une même tâche, la rencontre est éminemment personnelle; chacun la vit pour soi, à sa manière, sans pouvoir se cacher derrière le modèle collectif: «Tout le monde le fait, tout le monde pense que…, tous disent que…». Sans alibi, chacun va son propre chemin au-devant d’une rencontre.
Jésus ne cherche pas à terroriser ses disciples en agitant des menaces. Il les encourage à ne pas s’endormir, à rester éveillés pour ne pas manquer le rendez-vous-surprise. Si le moment est inconnu, il n’est pas imprévu. Rester éveillé, aiguiser son regard, tendre l’oreille pour accueillir celui qui vient n’est-ce pas reconnaître le Christ en toute rencontre? «Chaque fois que vous l’avez fait au plus petit de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait (Mt 25,40).»
«Gare à l’anesthésie» (Mt 24,37-44) - Méditation à partir de l'Évangile de Pierre Emonet sj pour le 1er dimanche de l'Avent 2022.