«De l’incroyance à la foi»

Deux hommes s’en vont. Profondément déçus, déprimés même, ils s’en retournent vers leur passé. En rencontrant Jésus ils avaient cru à une belle aventure; ils n’avaient pas hésité à le suivre pour partir à la découverte d’un idéal, d’une vie qui accomplirait la promesse des prophètes. Et tout s’était écroulé avec la condamnation du Maître. Blessés, ces hommes sont désormais incapables de lire les signes positifs qui peuvent donner raison aux plus fous espoirs: la promesse du troisième jour, la tombe vide, l’apparition des anges, rien ne parvient à les tirer de leur désespoir. Sans autre horizon que leur déconvenue, le regard brouillé par le chagrin, ils ne sont plus capables de reconnaitre Jésus qui marche avec eux sur le chemin de l’abandon.

La reconnaissance du Ressuscité n’a pas été immédiate. Il a fallu marcher quelques kilomètres, deux bonnes heures, pour que leurs yeux s’ouvrent enfin, qu’ils passent de l’incroyance à la foi, de la tristesse de l’absence à la joie de la présence. Ils s’étaient engagés sur une méprise; ils l’avouent, ils avaient suivi le Christ en faisant le pari d’un projet politique, la libération d’Israël. Les explications exégétiques de leur mystérieux compagnon de route les ouvrent à la compréhension du message des Prophètes et des Écritures: la vie donnée jusqu’à l’extrême est le seul langage de l’amour divin. Un commentaire qui réchauffe leurs cœurs et ranime la flamme des débuts.

Cet étonnant compagnon rencontré au hasard du voyage leur fait du bien. Discret, sans s’imposer, il fait mine de continuer sa route. Parce que le jour baisse, et que la nuit de la foi menace encore, les disciples déserteurs le retiennent. Bien leur en a pris. À table, ils reconnaissent le Resuscité à la fraction du pain. Si sa présence reste un défi pour les lois de la nature, les lieux où elle se manifeste, la table de la Parole et celle de l’eucharistie, sont bel et bien inscrits dans la réalité quotidienne des croyants comme une source de joie et d’énergie.

«De l’incroyance à la foi» (Lc 24,13-35) - Méditation à partir de l'Évangile de Pierre Emonet sj pour le 3e dimanche de Pâques - 23 avril 2023

Auteur:

Pierre Emonet SJ

Né en 1936, entré chez les jésuites en 1976, il se consacre à l'écriture et aux ministères ordinaires de la Compagnie: exercices spirituels dans la vie ou en retraites, accompagnement spirituel, prédication et aide dans le ministère paroissial. Il a également été le dernier directeur de la revue choisir qui a cessé de paraître fin 2022. Il a publié plusieurs livres, et notamment trois biographies de jésuites aux éditions Lessius : Ignace de Loyola - Légende et réalitéPierre Favre (1506-1546) - Né pour ne jamais s'arrêter, et récemment Pierre Canisius - L’infatigable réformateur de l’Église d’Allemagne (1521-1597). Il a également publié eb 2023, la première biographie en français de Pedro Arrupe sj: «Pedro Arrupe, un réformateur dans la tourmente». Un livre qui lui tenait à cœur –«mon dernier» précise-t-il– tant le Supérieur général de la Compagnie de Jésus du milieu du siècle dernier est pour lui «un modèle de jésuite».

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