Concernant la direction du Théâtre du Jura, le chapeau d’un article paru dans Le Temps du 24 octobre dernier m’a laissé perplexe. Dorian Rossel avait été nommé à la tête du susdit théâtre en juin, il quitte son poste en septembre. «Je ne peux pas accepter qu’on me calomnie sur la place publique», proclame l’intéressé. Ex-codirecteur de la Comédie de Genève de 2017 à 2023, Denis Maillefer prendra la tête du Théâtre du Jura dès la mi-janvier 2025 en tant que directeur artistique. Un bonne nouvelle.
À soi-seule, la proclamation de M. Rossel aurait pu justifier une démission. Or ce n’est pas ce que prétend l’article dont le chapeau précise que le directeur récemment nommé a été ‘écarté’. Une mise à l’écart et une démission, ce n’est pas la même chose; même si, dans la pratique, pour des raisons de compromis et de droit, la mise à l’écart prend parfois la forme juridique d’une démission.
L’ambiguïté demeure dans l’explication fournie par le journal. Le metteur en scène romand, est-il écrit, «a dû renoncer» à son poste. S’il a dû renoncer, c’est qu’il y a eu contrainte. Mais on ne sait pas quelle fut la nature de cette contrainte. D’autant plus que: «À l'origine de ce coup de théâtre, une lettre anonyme adressée au conseil de fondation de l’institution le présentait comme un harceleur.»
Je me garderai de choisir parmi tous les scénarios possibles sous-jacents à cette mise à l’écart. Je ne peux cependant m’empêcher de trouver bizarre qu’une lettre anonyme ait un tel effet. Certes, j’admets la sensibilité exacerbée de nos contemporains concernant ces questions de harcèlement, dont l’actualité récente a montré combien elles pouvaient être criminelles. Mais, jusqu’à plus ample information, de deux choses l’une. S’il y a calomnie comme le prétend le mis en cause, l’auteur de la lettre anonyme doit être retrouvé et sanctionné. S’il y a médisance, ce qu’une enquête sérieuse pourrait établir, c’est tout autre chose. La mise à l’écart est parfaitement justifiée. En l’état actuel des informations contradictoires fournies par le journal, je trouve qu’il est dommage qu’une lettre anonyme suffise à détruire la carrière d’un artiste.